mercredi 22 janvier 2014

" Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur "

« Goûtez et voyez comme est bon le Seigneur ! »

Ces derniers temps, j’ai parlé de différentes façons de la bonté de Dieu. J’ai d’abord mentionné à quel point le fondateur de ma Congrégation religieuse, le Père Bruno Lantéri, était imprégné de cette bonté de Dieu. Notre fondateur était italien, mais il connaissait très bien le français. Plusieurs de ses lettres ou écrits, étaient en français. J'imagine qu'il aimait mettre l'adjectif " bon " devant le mot " Dieu ", lorsqu'il écrivait dans la langue de Molière, car cela ne se fait pas vraiment dans la langue italienne. Le premier octobre 1803, il écrit une lettre à son bon ami Leopoldo Ricasoli, dans laquelle il fait part d'une décision déchirante qu'il a dû prendre. Il devait faire un choix entre demeurer à Florence pour voir à des choses importantes concernant l'Amicizia cristiana (une organisation de chrétiens fervents), ou bien retourner à Turin, où il avait pris des engagements pour cette période. Lantéri écrit ceci à Ricasoli, en français: 

" Je vous assure, Monsieur, et très honorable ami en J.C. que j'ai passé des jours bien inquiet sur la volonté adorable de Dieu à cet égard; je manque, entre autres choses bien intéressantes à Turin, à une retraite de jeunes ecclésiastiques, qui m'était bien à coeur, et que je devais leur donner dans ce mois, et qui n'aura plus lieu certainement pour cette année; patience, j'espère que vous voudrez bien m'aider par vos ferventes prières à m'obtenir du bon Dieu d'en être dédommagé en quelque façon." (Carteggio, volume II, p. 147)

Dans mon dernier blogue, j’ai mentionné à quel point je trouvais beau le fait que le peintre Rembrandt ait dépeint comme étant aveugle le Père, dans son fameux tableau intitulé : Le retour du fils prodigue (en passant, un des textes les plus beaux que j’aie mis sur mon blogue, à mon humble avis, est le texte suivant :  Dieu ma joie: Nouwen, Rembrandt et " Le Retour de l'enfant prodigue "; vous n'avez qu'à cliquer sur les mots précédents, écrits en bleu, pour avoir accès directement au texte).

Un de mes meilleurs amis, qui habite la ville de Québec et qui se nomme Michel Fontaine (et dont j’ai parlé plus d’une fois dans mon blogue), m’a écrit ceci, il y a deux jours, via internet :

Merci Guy pour ce texte.

Un Dieu aveugle, un Dieu qui ne voit pas nos péchés comme image de la miséricorde de Dieu...?

Il y a  cette image aussi dans le livre d’Éric Emmanuel Schmitt (1)Lorsque j'étais une œuvre d'art” : un jeune homme se livre aux expérimentations d'un savant fou et son apparence devient monstrueuse. Il rencontre un homme sage, bon, aveugle, qui ne voit pas la monstruosité du jeune homme mais qui aperçoit le fond de son cœur qui est bon. De même Dieu voit au-delà du péché, comme s'il ne le voyait pas, parce qu'il sonde les reins et pénètre les pensées du cœur. "Le cœur de l'homme est compliqué et malade qui peut le connaître? Moi, le Seigneur qui sonde les reins et les pensées du cœur pour juger chacun selon ses actes, selon les fruits qu'il porte.” (Jérémie, ).

Il y a aussi l'excellent film “L'homme éléphant” avec la chanteuse Cher. Un jeune homme défiguré et très laid à cause d'une maladie congénitale, mais d'une grande bonté et intelligence, rencontre une jeune aveugle très belle qui perçoit sa richesse intérieure avec les yeux du cœur et tombe amoureuse de lui. C'est un peu comme l'histoire “La belle et la bête”. C'est réconfortant de penser que Dieu ne se laisse pas repousser par notre laideur. Le danger c'est que nous nous repoussions nous-mêmes lorsque nous le rencontrerons. Car alors nous verrons sa bonté et son humilité et nous verrons jusqu'à quel point nous sommes orgueil et ténèbres.

J'ai lu dernièrement un livre de Frossard qui souligne ce danger. Car il a rencontré Dieu. Il parle d'expérience.

« Ce que je ne vois pas le moyen d’appeler autrement que ma consternation radieuse à me voir si laid m’aura puissamment aidé à comprendre pourquoi Dieu ne se manifestait pas plus souvent dès cette vie. Tout serait tellement plus simple, dit-on, si nos yeux le voyaient sitôt ouverts…
(...) Seule la comparaison avec Dieu peut nous permettre de prendre conscience du bouillon de ténèbres dans lequel nous trempons avec naturel et quelquefois même avec élégance. Mais l’effet risque d’être radical. Ce n’est pas la toute-puissance de Dieu qui nous menace... Ce qui est à redouter, c’est sa douceur. Ce que sa charité dérobe à notre vue, c’est la fulguration nucléaire de l’infini qui se contracte dans une inconcevable humilité. C’est l’éternelle et limpide innocence de Dieu qui brise les cœurs. Il ne peut paraître sans que nous portions aussitôt sur nous-mêmes un jugement et une condamnation sans appel, ni rémission. Et c’est ce qu’il ne veut pas. » [André Frossard, Il y a un autre monde, Fayard, 1976, pp. 75-76]

Michel

Ce que mon bon ami Michel, met ici en évidence, c’est l’extrême bonté de Dieu. Un Dieu qui ne se révèle pas tel qu’Il est pendant notre court séjour sur cette terre, pour ne pas que son incommensurable bonté nous écrase et nous effraie. Le contraste entre la beauté et la bonté de Dieu et notre laideur et méchanceté, nous serait insupportable, et nous ne pourrions pas vivre en paix. Et « c’est ce que Dieu ne veut pas ». Une telle vision de Dieu, aux yeux de certains, pourrait sembler un danger; certaines personnes pourraient croire ou imaginer que le fait de présenter un Dieu aussi bon et miséricordieux, conduise au laxisme ou à un agir immoral. Si Dieu est si bon, profitons-en pour faire le mal. Mais c’est plutôt le contraire que nous expérimentons instinctivement : devant tant de bonté de la part de Dieu, nous ne pouvons qu’être attirés vers Lui. Nous ne pouvons qu’aimer davantage ce Dieu et vouloir lui plaire; vouloir l’aimer davantage à notre tour, et en retour.

Je ne sais pas s’il vous arrive d’entendre des témoignages d’EMI (d’expérience de mort imminente ou NDE « Near Death Experience). J’ai écouté et regardé hier, une vidéo à ce sujet, sur internet. Ce qui frappe, dans de telles expériences, c’est l’infinie bonté de Dieu et la transformation des personnes qui vivent de telles expériences. Les gens qui vivent cela, ne sont plus capables de vivre leur vie comme auparavant. Ces personnes sont littéralement transformées par l’Amour, attirées par l’Amour et ne veulent plus vivre que de l’Amour.


(1) Éric Emmanuel Schmitt est l’auteur francophone le plus lu sur la planète. J’ai à quelques reprises parlé de cet auteur, sur mon blogue. NDLR (note de la rédaction).

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