dimanche 20 janvier 2013

Il y eut des noces à Cana, en Galilée

Il y eut des noces à Cana, en Galilée

Fresque de Giusto di Menabuoi, vers 1376, baptistère de Padoue  

« Il y eut des noces à Cana en Galilée, et la mère de Jésus était là. » (Jn 2, 1) Ainsi commence l’évangile du deuxième dimanche du temps ordinaire que nous vivons. Profitons de cette Parole de Dieu pour approfondir et enraciner notre dévotion mariale.

Des quatre évangélistes, deux seulement ont côtoyé Jésus quotidiennement : Mathieu et Jean. Les deux autres évangélistes, Marc et Luc, ont connu Jésus par personne interposée. Marc a été le disciple de l’apôtre Pierre et Luc le compagnon de voyage de l’apôtre Paul. Or nous connaissons la Vierge Marie grâce à deux évangélistes spécialement : Jean et Luc. Quoique Luc nous parle davantage de Marie, je suis personnellement beaucoup plus intéressé par ce que nous dit saint Jean de la « mère de Jésus ». Pourquoi? La raison en est simple: Jean a parlé, a beaucoup parlé avec Marie; Luc a entendu parler de Marie. Jean a connu Marie dès le début de la vie publique de Jésus. Jean, un des deux premiers disciples appelés par Jésus, était là aux noces, à Cana en Galilée. Jean est le seul apôtre à avoir été au pied de la croix avec Marie et d’autres femmes disciples de Jésus. Jean a été témoin de la force et de la prière de Marie au moment le plus crucial de l’histoire de l’humanité : la mort de Dieu sur la croix en son Fils Jésus. C’est à saint Jean que Jésus a confié sa mère, avant de mourir. Jean a prié avec Marie dans le cénacle après la résurrection de Jésus, dans l’attente de l’Esprit Saint. Et, surtout, Jean a vécu des années (combien d’années, nous l’ignorons) avec Marie dans la même maison: « Puis Jésus dit au disciple: « Voici ta mère ». Dès cette heure-là, le disciple l’accueillit chez lui ». (Jn 19, 27) Quelle chance a eue l’apôtre Jean de côtoyer la mère de Dieu durant des années! Voilà la grâce insigne que peut obtenir celui et celle qui se tient debout sous la croix de Jésus, avec Marie.

On comprend donc que saint Jean ait en quelque sorte « enchâssé » toute la vie publique de Jésus entre deux événements grandioses où Marie était présente: les noces de Cana et la mort de Jésus en croix. Voyons donc ce que saint Jean nous dit de Marie à Cana. La première chose qui frappe le lecteur de ce premier miracle de Jésus, c’est que la présence de Marie semble plus importante à ces noces, que celle de Jésus. Saint Jean a écrit :

Jn 2:1-
Le troisième jour, il y eut des noces à Cana de Galilée, et la mère de Jésus y était.
Jn 2:2-
Jésus aussi fut invité à ces noces, ainsi que ses disciples.

Le pape Jean-Paul II, dans sa merveilleuse lettre encyclique sur la Vierge Marie, intitulée « Rédemptoris Mater », va aussi un peu dans ce sens : « On pourrait déduire du texte que Jésus et ses disciples furent invités avec Marie, en quelque sorte à cause de la présence de cette dernière à la fête: le Fils semble invité à cause de la Mère. » (Rédemptoris Mater, no. 21) Marie, à Cana, nous est présentée comme étant une femme qui sait observer ce qui se passe autour d’elle. Le pape Paul VI dans sa lettre sur « la joie chrétienne », nous dit quelque chose de très important, selon moi, sur Jésus. Il nous dit que le regard de Jésus était très concret, très attentif aux choses qui se passaient autour de Lui: « La profondeur de sa vie intérieure n'a pas émoussé le concret de son regard, ni sa sensibilité. » (Gaudete in Domino, no. 23) S’il y a un doux reproche que je pourrais faire au Jésus de Zeffirelli, dans son film magistral intitulé « Jésus de Nazareth », c’est celui-ci: parfois Jésus, en présence des gens, semblait plutôt en présence de son Père. Son regard était un peu hagard, selon moi, comme perdu dans ses pensées, dans la pensée de son Père. Le regard de Jésus sur les gens et les choses, était très concret; ainsi aussi était le regard de Marie. Je suis certain que toutes les personnes présentes à la noce, n’avaient pas remarqué qu’une situation très embarrassante était sur le point de se produire. Car manquer de vin à une noce  aussi grandiose que celle à laquelle ont participé Marie, Jésus et les apôtres, ce jour-là, aurait été assez dramatique. Marie voit venir la chose, et décide d’intervenir.

Marie fera alors en quelque sorte deux prières: une à Jésus et l’autre aux serviteurs. À Jésus, elle dit simplement, et avec beaucoup de douceur : « Ils n’ont plus de vin ». Cette douceur et cette bonté contrastent avec la réponse de Jésus qui semble très dure et quelque peu « impersonnelle » : « Que me veux-tu, femme ? Mon heure n'est pas encore arrivée ». Je ne sais pas ce que vous auriez fait en entendant une telle réponse, mais je sais ce que j’aurais fait : je serais allé me « rasseoir », en me disant que j’avais fait mon possible pour résoudre le problème, mais que la réponse de Jésus était on ne peut plus claire : ce n’est pas le temps de montrer au monde qui Il est vraiment. Mais telle n’a pas été la réaction de Marie. Elle ne s’est pas découragée devant un tel refus apparent de s’impliquer de la part de son fils. Elle a continué sa démarche et sa prière et elle s’est adressée aux serviteurs, en leur disant: « Tout ce qu'il vous dira, faites-le ». Comme j’aurais aimé être présent ce jour-là à Cana pour entendre le ton de Marie alors qu’elle adressait cette prière aux serviteurs. Je ne sais vraiment pas comment cette prière est sortie de la bouche de Marie, mais ce que je sais, c’est que Marie a été très convaincante. Il le fallait car les serviteurs ont obéi à deux ordres de Jésus; deux ordres très difficiles à accomplir, selon moi; surtout le deuxième. Jésus commence par leur demander de remplir d’eau six jarres pouvant contenir chacune cent litres. Je ne sais pas où ces serviteurs ont puisé l’eau, mais c’était déjà une tâche énorme. Jésus voulait vraiment s’assurer qu’on ne manque pas de vin à cette fête. L’évangile nous dit que les serviteurs se sont très bien exécutés et qu’ils ont rempli les jarres « jusqu’au bord ». Et alors, arriva le deuxième ordre : « Puisez maintenant et portez-en au maître du repas ». Cet ordre était beaucoup plus risqué et dangereux, selon moi. L’ordre a été donné au pluriel. Les serviteurs devaient tous, semble-t-il, puiser de l’eau et en apporter au maître du repas. Je les imagine, en procession, chacun avec une coupe à la main, très certainement une coupe non transparente, et se dirigeant vers la « table d’honneur ». Si cette eau était demeurée de l’eau, je crains fort que le maître du repas n’aurait pas trouvé la chose très drôle et aurait probablement congédié sur le champ les dits serviteurs. Mais, j’imagine, à la dernière minute, l’eau fut changée en vin, et un vin délicieux, d’après ce qu’on en dit. Et ce fut la joie, au lieu de la tristesse.

On ne peut qu’admirer le cran, la détermination, la force et le courage de la Mère de Dieu, déjà, au début de la vie publique de Jésus. En cette année de la foi, demandons à Dieu, non pas n’importe quelle foi; demandons la foi de Marie. L’épisode de Cana nous montre que Marie est capable de déposer sa foi dans le cœur des gens, que sa foi est en quelque sorte « contagieuse ». Marie a déposé sa foi et sa détermination dans le cœur de serviteurs qui n'avaient probablement jamais vu cette femme intrépide et convaincante auparavant. Notre Mère du ciel n’en fera-t-elle pas tout autant, et même plus, pour nous qui l’aimons comme notre Mère?

Cet épisode vécu à Cana en Galilée, nous invite à changer l’image que nous nous faisons parfois de la Vierge Marie. Si vous êtes comme moi, vous vous êtes sûrement déjà représenté la Vierge Marie comme étant une femme tranquille, tout adonnée à la prière et à la contemplation. J’imagine que la personnalité de Marie correspondait un peu à cela. Mais Marie n’était pas que cela. Elle était très active, très empressée à rendre service. Le deuxième mystère du rosaire nous invite à contempler Marie qui s’en va « en hâte » aider sa cousine Élisabeth qui est enceinte. Pour la Vierge Marie, quand il s’agit d’aider, il n’y a pas de temps à perdre. À Cana en Galilée, Marie fait tout ce qui est en son pouvoir pour que la joie des nouveaux époux ne soit pas assombrie par le manque de vin.  Ce n’est pas une réponse énigmatique et apparemment dure de son Fils, qui la découragera. Elle réussira même à convaincre des serviteurs qui ne connaissaient sûrement pas intimement son Fils, de faire tout ce qu’Il leur dira. Sur la route menant à la maison d’Élisabeth, et à Cana de Galilée, la Vierge Marie nous est présentée comme étant une femme d’action, une femme décidée et volontaire, qui ne compte pas les efforts et ne se laisse pas intimider par les obstacles. Voilà le genre de femme qu’est Marie de Nazareth. C’est ainsi que je me plais désormais à la représenter et à l’imaginer. Et que dire de la force d’âme et de la force psychologique de la Mère de Dieu qui se tient debout au pied de la croix et qui regarde son Fils souffrir, tout en recevant sûrement, Elle aussi, sa part d’injures et de moquerie. Marie fut peut-être tranquille à ses heures; mais Elle est aussi et surtout la « femme forte de l’Évangile ». 

Le premier miracle de Jésus est quand même assez étonnant. Il ne s’agit pas ici de guérir quelqu’un d’une maladie grave, ou de délivrer du Mauvais un « possédé ». Comparativement aux autres miracles que fera Jésus, le caractère urgent ou nécessaire du miracle, n’était pas absolument évident. Mais, comme on le verra dans un instant grâce à un texte du pape Jean-Paul II, Marie nous est présentée à Cana en Galilée, comme notre Mère qui vient au secours de tous les besoins de ses enfants. 

Le pape Jean-Paul II, dans son encyclique sur la Vierge Marie, nous dit qu’à Cana, Marie a découvert qu’elle serait la mère des êtres humains et aussi qu’elle aurait un rôle de médiatrice entre Dieu et les hommes. Voici quelques extraits de cette encyclique:  

« Dans le texte johannique, au contraire, par la description de l'événement de Cana, se dessine ce qui se manifeste concrètement comme la maternité nouvelle selon l'esprit et non selon la chair, c'est-à-dire la sollicitude de Marie pour les hommes, le fait qu'elle va au-devant de toute la gamme de leurs besoins et de leurs nécessités.

A Cana de Galilée, seul un aspect concret de la pauvreté humaine est montré, apparemment minime et de peu d'importance (« Ils n'ont pas de vin ») . Mais cela a une valeur symbolique: aller au-devant des besoins de l'homme veut dire, en même temps, les introduire dans le rayonnement de la mission messianique et de la puissance salvifique du Christ. Il y a donc une médiation: Marie se situe entre son Fils et les hommes dans la réalité de leurs privations, de leur pauvreté et de leurs souffrances. Elle se place «au milieu», c'est-à-dire qu'elle agit en médiatrice non pas de l'extérieur, mais à sa place de mère, consciente, comme telle, de pouvoir montrer au Fils les besoins des hommes -ou plutôt d'en «avoir le droit». Sa médiation a donc un caractère d'intercession: Marie «intercède» pour les hommes. Non seulement cela: en tant que Mère, elle désire aussi que se manifeste la puissance messianique de son Fils,c'est-à-dire sa puissance salvifique destinée à secourir le malheur des hommes, à libérer l'homme du mal qui pèse sur sa vie sous différentes formes et dans des mesures diverses. C'est cela précisément qu'avait prédit le prophète Isaïe au sujet du Messie dans le texte célèbre auquel Jésus s'est référé devant ses concitoyens de Nazareth: «Pour porter la bonne nouvelle aux pauvres, ... annoncer aux captifs la délivrance et aux aveugles le retour à la vue ...» (cf. Lc 4, 18) »  (Redemptoris Mater, no. 21)

Pour lire l'encyclique de Jean-Paul II sur la Vierge Marie, cliquez sur le lien suivant: Redemptoris Mater - Jean-Paul II - Lettre encyclique, 25 mars 1987


1 commentaire:

  1. C'est étrange, en me levant ce dimanche matin, j'avais en tête la fort belle chanson que Lise nous avait déjà partagée il y a de cela plusieurs mois, Petit chant de Famille Myriam - avec les jeunes du Défi-Jeunesse Myriam "Ton regard, Jésus", cd "L'Espérance, c'est pour toi. C'était en rapport avec un commentaire d'un autre membre du blog auquel Lise avait répondu.

    Et voici que j'ouvre l'ordinateur, me dirige vers le blog de notre ami père Guy, et y découvre ce merveilleux texte qu'il nous offre aujourd'hui.

    N'est-ce pas fantastique !

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